politique/Greve.html
<!--#include virtual="/header-start.html" -->
<title>Grève</title>
<!--#include virtual="/header-end.html" -->
<p>Après avoir été considérée dans la plupart des pays comme une action criminelle jusqu'à la fin du 19ème et même dans
le milieu du 20ème siècle, la grève est devenue un droit fondamental. </p>
<p>Il est consacré dans le <em>Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels</em> adopté en
<time>1966</time>, mais a véritablement été développé au plan international dans le cadre des organes de contrôle de
l'OIT : par le CLS depuis <time>1952</time> et par la Commission d'experts depuis <time>1959</time>. En effet, le
droit de grève n'est pas mentionné expressément dans les conventions ou recommandations de l'OIT. Il a été développé
par ces deux organes de contrôle à partir de l'article 3 de la convention 87. Il s'agit donc d'une création
jurisprudentielle à partir du droit des organisations de travailleurs <q>d'élaborer leurs statuts et règlements
administratifs, d'élire librement leurs représentants, d'organiser leur gestion et leur activité, et de formuler
leur programme d'action</q>. </p>
<p>Le CLS s'attache plus au cas par cas, aux problèmes pratiques soulevés dans des plaintes. Il s'agit ici d'une
perspective tripartite où les membres travailleurs, employeurs et gouvernementaux siègent à titre personnel, sans
recevoir d'instructions de quiconque, mais qui ne méconnaissent pas la position du secteur qu'ils représentent au
Conseil d'administration. La Commission d'experts attache plutôt son attention aux législations nationales pour voir
leur conformité avec les conventions ratifiées. Il s'agit d'une perspective plus technique. </p>
<p>Ce mariage des compétences propres à chaque organe de contrôle a contribué à élaborer un corps de règles réalistes
sur le droit de grève et qui fait maintenant l'objet d'un vaste consensus international.</p>
<p>Il convient également d'évoquer la position de la Commission de l'application des normes de la Conférence
internationale du Travail instituée chaque année qui examine les rapports de la Commission d'experts et prend
connaissance des décisions du CLS pour ensuite procéder à une discussion tripartite des cas les plus graves. S'il y a
consensus sur le principe du droit de grève, il n'y a pas identité de vues entre les membres travailleurs, employeurs
et gouvernementaux au sein de cette dernière Commission. Les travailleurs appuient sans réserve la position de la
Commission d'experts et considèrent que le droit de grève fait partie de la convention 87.</p>
<p>Pour les employeurs, le droit de recourir à l'action directe (droit de grève d'un côté et <em>lock-out </em>de
l'autre) fait partie de droit international coutumier. Il ne faut pas y apporter des limitations excessives. Mais,
puisque ce droit n'est pas mentionné expressément dans les conventions 87 et 98, la Commission d'experts n'a pas à en
déduire un droit précis et détaillé. Exemple : discussion sur les services essentiels ne sera pas acceptée par les
membres employeurs car ces services ne sont pas mentionnés explicitement dans la convention n° 87. Quant aux membres
gouvernementaux, leurs vues sont multiples. Certains appuient la Commission d'experts, d'autres soulèvent des
problèmes en matière de fonction publique, la majorité est silencieuse. </p>
<p>On constate que le principe du droit de grève est universellement admis. Les problèmes que l'on rencontre se situent
au niveau des conditions ou restrictions imposées à l'exercice de ce droit. Les problèmes les plus fréquemment
rencontrés au plan international sont : </p>
<ul>
<li>l'imposition de l'arbitrage obligatoire par décision des autorités ou à la demande d'une seule partie au
différend</li>
<li>l'institution de sanctions pénales pour faits de grève (organisation ou participation)</li>
<li>exigence de l'accord d'une majorité excessive de travailleurs pour les actions de grève</li>
<li>interdiction de la grève dans la fonction publique pour les fonctionnaires qui n'exercent pas des fonctions
d'autorité au nom de l'état</li>
<li>la procédure de réquisition et l'interdiction du droit de grève dans des services qui ne sont pas des services
essentiels. </li>
</ul>
<p>à un niveau encore plus général, le droit de grève soulève un problème d'anachronisme. En effet, c'est avec
l'émergence du modèle de l'entreprise industrielle en Europe au 19ème siècle que la grève est devenue le principal
moyen d'action collective des travailleurs. Mais, elle porte aujourd'hui les marques de son origines : elle a été
conçue comme une collectivité de travailleurs soumise au pouvoir d'un seul employeur contrôlant l'ensemble de sa
production sous l'égide d'une loi nationale. Ce modèle de l'entreprise n'a cessé de décliner avec la libéralisation
des échanges et la délocalisation des unités de production de l'entreprise. Bref, le droit de grève semble être un
outil moins bien adapté aux réalités contemporaines. </p>
<p>Le droit de grève a cependant toujours soulevé une certaine ambiguïté dans les services publics. L'action collective
n'a jamais pu être enfermée dans le binôme "employeurs/salariés". L'action collective dans les services publics fait
intervenir un troisième acteur. L'état, comme ses fonctionnaires, sont en effet placés au service de l'intérêt
général. Les travailleurs ne peuvent faire pression sur l'état qu'en privant les usagers d'un service. La mesure est
par conséquent généralement moins bien reçue. Le statut particulier des travailleurs des services publics constitue
leur force mais aussi leur faiblesse. </p>
<p> Le droit de grève doit être considéré comme un droit fondamental des organisations de travailleurs (syndicats,
fédérations et confédérations), protégé au niveau international dans la mesure où il s'exerce de façon pacifique. Le
mot clé ici est pacifique. Exemple : l'établissement de piquets de grève sera protégé s'il s'exerce de façon pacifique
et ne porte pas atteinte à la liberté du travail des non-grévistes. Les principes de la liberté syndicale ne protègent
pas contre l'usage abusif du droit de grève (non-observation des conditions jugées raisonnables ou actes de caractère
délictueux).</p>
<p>Absence de définition internationale de la grève Question qui surgit fréquemment est de savoir si l'action des
travailleurs est une grève au sens de la loi. La Commission d'experts a jugé que tout arrêt de travail, si bref fûtil,
est une grève. Mais que dire lorsque nous sommes en présence, non pas d'une cessation du travail, mais d'un
ralentissement du travail (grève perlée) ou d'une application stricte des règles (grève du zèle). Devant les pratiques
et les législations nationales fort variées en ce domaine, les organes de contrôle sont d'avis que ces formes de grève
doivent également être protégées. 6 Cas des grèves politiques Les grèves de caractère purement politique, c'est-à-dire
celles qui n'ont pas de lien direct avec les intérêts socio-économiques des travailleurs, ne relèvent pas des
principes de la liberté syndicale protégés internationalement. Le problème consiste à distinguer nettement entre ce
qui est socio-économique et ce qui est politique. Souvent les intérêts professionnels des travailleurs comprennent
l'amélioration des conditions de travail et passent par la recherche de solution aux grandes questions économiques et
sociales. Cette ambiguïté est d'autant plus ressentie chez les travailleurs de la fonction publique (action des
pouvoirs publics, tel que le gel des prix et des salaires dans le cadre d'un plan de restructuration économique, va
avoir des effets immédiats sur les travailleurs de ce secteur). Aussi, cette restriction ne vise pas les grèves
tendant à la solution des grands problèmes de politique économique et sociale. Cas des grèves de solidarité
L'interdiction générale des grèves de solidarité serait abusive; les travailleurs doivent pouvoir recourir à cette
forme d'action dès lors que la grève initiale qu'ils soutiennent est elle-même légitime. Les travailleurs ont donc le
droit de faire grève pour défendre des intérêts socio-économiques ou syndicaux qui ne les touchent pas directement. Il
risque d'avoir un intérêt plus marqué pour ce type de grève en raison de la mondialisation de l'économie (mouvement de
concentration des entreprises et délocalisation des unités de production du travail). Catégories et situations où des
interdictions et restrictions au droit de grève sont permises Le droit de grève doit être reconnu aux travailleurs du
secteur public comme à ceux du secteur privé. </p>
<h2>Restrictions</h2>
<p>Ce droit ne peut être refusé ou soumis à des restrictions que pour les catégories et situations suivantes : </p>
<ol>
<li><strong>aux membres des forces armées et de la police </strong>(exception prévue dans la convention 87)</li>
<li><strong>aux fonctionnaires exerçant des fonctions d'autorité au nom de l'état</strong>. Lors des discussions
menant à l'adoption de la convention n° 87 en 1947, on a tenu à spécifié que <q>la reconnaissance du droit syndical
des agents publics ne préjugeait en rien la question du droit de grève des fonctionnaires</q>. La convention n°
151 et la recommandation n° 159, adoptées en 1978, sur les relations de travail dans la fonction publique ne
mentionnent pas non plus le droit de grève. Reste à savoir quels sont les fonctionnaires à qui le droit de grève
peut être refusé. La notion de fonctionnaire varie d'un pays à l'autre. Suivant l'interprétation des organes de
contrôle, seuls les fonctionnaires exerçant une fonction d'autorité au nom de l'état peuvent être éventuellement
privés du droit de grève. Le critère à retenir pour l'OIT n'est pas les définitions législatives nationales du
statut de la fonction publique mais bien la nature des fonctions exercées. L'état pourrait donc restreindre le droit
de grève des fonctionnaires du pouvoir judiciaire sans qu'il en aille de même pour le personnel des entreprises
publiques. Le CLS a été amené à désigner expressément certaines catégories qui ne peuvent être considérées comme
exerçant des fonctions d'autorité au nom de l'état : employés publics des entreprises commerciales ou industrielles
de l'état; travailleurs des entreprises pétrolières; employés des établissements bancaires; agents des transports
métropolitains; le personnel enseignant. </li>
<li><strong>aux travailleurs des services essentiels, </strong>c'est-à-dire les services dont l'interruption mettrait
en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la sécurité ou la santé de la personne. En
1983, la Commission d'experts a donné la définition de services essentiels au sens strict du terme, c'est-à-dire les
services dont l'interruption mettrait en danger, dans l'ensemble ou dans une partie de la population, la vie, la
sécurité ou la santé de la personne. Le CLS et la Commission d'experts considèrent que les fonctionnaires qui ne
jouissent pas du droit de grève et les travailleurs des services essentiels doivent bénéficier de garanties
appropriées pour la défense de leurs intérêts, telles que des procédures de conciliation et d'arbitrage impartiales
auxquelles ils soient associés à toutes les étapes et qui débouchent sur des décisions obligatoires pour les deux
parties et destinées à être appliquées. Pour le CLS, peuvent être considérés comme des services essentiels jusqu'à
maintenant suivant la méthodologie du cas par cas :
</li>
<ul>
<li>le secteur hospitalier</li>
<li>les services d'électricité et d'approvisionnement en eau</li>
<li>les services téléphoniques et le contrôle du trafic aérien.</li>
</ul>
<li><strong>dans le cas de situations de crise nationale aiguë</strong>. </li>
</ol>
<p>Ces situations sont, par définition, pour un temps limité et évoquent des circonstances qui empêchent le
fonctionnement de la société civile (conflits, insurrections, catastrophes naturelles). </p>
<h3> Service minimum</h3>
<p>Il faut distinguer les services essentiels du service minimum : ce dernier est approprié dans les situation où une
limitation importante ou une interdiction de grève n'apparaît pas justifiée et où, sans remettre en cause le droit de
grève de la plus grande partie des travailleurs, il pourrait être envisagé d'assurer la satisfaction des besoins de
base des usagers ou encore la sécurité ou le fonctionnement continu des installations. Un service minimum de sécurité
peut être imposé lors des grèves dans la mesure où il s'agit de prévenir les accidents et d'assurer la sécurité des
personnes et des installations. </p>
<p>Le CLS limite l'établissement du service minimum aux : </p>
<ol>
<li> services essentiels </li>
<li> services qui ne sont pas essentiels mais où l'ampleur et la durée de la grève peuvent provoquer une crise
nationale aiguë.</li>
<li> dans les services publiques d'importance primordiale (ex : services de transbordeurs desservant les îles; ports;
transports métropolitains; chemins de fer; services postaux et bancaires, administration de la monnaie). </li>
</ol>
<p>Les organisations de travailleurs devraient être associées avec les employeurs et les pouvoirs publics, à la
détermination des modalités du service minimum (étendue du service minimum et le nombre de travailleurs qui doivent
l'assurer). Le critère central est que la grève ne doit pas être rendue inopérante en raison d'une trop grande étendue
du service minimum. Il faut pouvoir maintenir l'efficacité des moyens de pression. En cas de divergence sur
l'établissement du service minimum, la législation doit prévoir le règlement par un organe indépendant. </p>
<h3>Réquisition des travailleurs</h3>
<p>La réquisition ou le recrutement de travailleurs n'est admissible qu'en cas de grève dans les <strong>services
essentiels ou dans des circonstances d'une extrême gravité</strong>. </p>
<h3>Retenue de salaire</h3>
<p>Les dispositions législatives qui prévoient la retenue du salaire pour les jours de grève ne sont pas contraires aux
principes sur la liberté syndicale. </p>
<h3>Protection des travailleurs-grévistes</h3>
<p>Une protection appropriée doit être assurée aux dirigeants syndicaux et aux travailleurs contre les mesures dont ils
pourraient faire l'objet pour avoir organisé des grèves licites (licenciements et autres mesures préjudiciables en
matière d'emploi). Des procédures rapides, efficaces et impartiales doivent être prévues ainsi que des mesures de
réparation et des sanctions dissuasives. </p>
<p>Droit à la négociation collective : principes et règles minimales é noncés par la Commission d'experts et le Comité
de la liberté syndicale Droit reconnu et protégé internationalement La négociation collective est un droit fondamental
reconnu internationalement et qui fait l'objet d'un consensus au sein de la communauté internationale. Elle est
l'expression dans la pratique de la liberté d'association dans le monde du travail. Dans les instruments de l'OIT, la
négociation se conçoit comme une activité ou un processus qui a pour but la conclusion d'un accord. Il s'agit donc
d'un droit à un processus et non à un résultat. Des garanties devront être accordées pour assurer le bon déroulement
de la négociation collective libre et volontaire et l'autonomie des parties. La grande caractéristique de la
protection de la négociation collective au plan international nous force à insister sur son aspect volontaire. Cet
aspect est fondamental dans les principes de la liberté syndicale et il doit guider notre interprétation et
l'accomplissement des obligations internationales que les états membres ont contractées. </p>
<p>Catégories </p>
<p>Seules peuvent être exclues du droit de négociation collective suivant la convention 98 (autrement dit les garanties
prévues dans la convention 98 s'appliqueront à ces catégories dans la mesure déterminée par la législation
nationale): </p>
<ol>
<li><strong>les forces armées </strong></li>
<li><strong> la police </strong></li>
<li><strong> les fonctionnaires publics </strong>: La négociation collective dans la fonction publique pose des
problèmes particuliers qui tiennent: 1. à un ou des statuts nationaux, applicables à tous les agents publics,
tendant à l'uniformisation, et adoptés par les parlements; 2. au fait que les rémunérations des travailleurs dans le
secteur public découlent des budgets publics et dépendent de l'approbation d'organes chargés de tenir 10 compte,
dans leurs décisions, de la situation économique du pays et de l'intérêt général. Des modalités particulières
peuvent donc être adoptées pour la négociation dans le secteur public. Il ne faudrait pas oublier toutefois que la
reconnaissance du droit de négocier collectivement a une portée générale tant dans le secteur privé que public. Les
exclusions doivent donc être interprétées de manière restrictive. Les organes de contrôle ont établi une distinction
entre les fonctions dont les activités sont propres à l'administration de l'état, et qui peuvent être exclues du
champ d'application de la convention, et les personnes employées par le gouvernement, les entreprises publiques ou
les institutions publiques autonomes qui devraient bénéficier des garanties de la convention 98. Seuls les agents
publics d'un niveau élevé et dont les fonctions sont normalement considérés comme ayant trait à la formulation des
politiques à suivre sont exclus. </li>
</ol>
<p>Matières protégées par la négociation collective La convention 98 (articles 4-6) associe la négociation collective à
la conclusion d'une convention collective en vue de régler les conditions de travail et d'emploi. Le problème soulevé
est celui de la définition de conditions d'emploi. Cette notion floue a toutefois été interprétée par les organes de
contrôle de l'OIT. Exemple : le CLS a indiqué qu'on peut raisonnablement considéré comme étrangères au champ de la
négociation collective les « questions relevant en premier lieu de la gestion des affaires gouvernementales
». Dans le cas n° 1951 concernant le Canada (Ontario), le CLS a estimé que l'élaboration des lignes générales de
la politique de l'enseignement ne se prête pas à la négociation collective avec les organisations du personnel
enseignant. Les conséquences des décisions de politique éducative sur les conditions de l'emploi sont toutefois
matière à négociation collective. Caractère volontaire L'article 4 de la convention 98 prévoit expressément le
caractère volontaire de la négociation collective. La négociation collective doit se dérouler de bonne foi. Les
organes de contrôle de l'OIT ont accepté l'imposition de certaines sanctions en cas de procédures contraires à la
bonne foi ou de pratiques déloyales dans la négociation collective, sous réserve qu'elles ne soient pas
disproportionnées. Les organes de contrôle ont également accepté l'imposition par voie législative de la conciliation
et la médiation pour autant que les délais accordés à la négociation soient raisonnables. </p>
<p> Arbitrage obligatoire </p>
<p>L'arbitrage obligatoire est toujours contraire au caractère volontaire de la négociation dans la mesure où la
solution qu'il impose ne procède pas de la volonté des parties mais d'une troisième à laquelle les parties n'ont pas
fait conjointement appel. Il s'agit d'une des formes les plus radicales d'intervention des autorités en matière de
négociation collective. L'arbitrage obligatoire peut être imposé directement par la législation, soit par décision
administrative, lorsque les parties n'arrivent pas à un accord ou après un certain nombre de jours de grève.
L'arbitrage peut également être demandé par une seule des parties. Les organes de contrôle admettent l'arbitrage
obligatoire dans le cas de conflits dans : 1. la fonction publique pour les fonctionnaires commis à l'administration
de l'état (compte tenu du fait qu'ils peuvent être exclus du droit de négociation collective); 2. dans les services
essentiels au sens strict du terme . L'arbitrage obligatoire est cependant acceptable s'il est prévu dans la
convention collective comme mécanisme de règlement des différends, ainsi qu'après des négociations prolongées et
infructueuses et qu'il devient évident que l'on ne sortira pas de l'impasse sans une initiative des autorités.
Intervention des autorités Les conventions de l'OIT concernant la négociation collective ne contiennent pas de
dispositions sur les conflits possibles entre les intérêts particuliers des parties et l'intérêt général. Ce problème
se fait sentir avec acuité pour les travailleurs du secteur public. Il arrive fréquemment que les gouvernements
recourent à des politiques restrictives en matière de revenus ou de salaires lors de crise économique, pour lutter
contre l'inflation et le chômage, pour rééquilibrer la balance des paiements ou autres objectifs économique. Ces
politiques se traduisent par un gel des salaires ou une limitation des augmentations de salaires qui vont souvent
restreindre le champ des négociations collectives. Ces mesures ont été fort utilisées dans les deux dernières
décennies. Les interventions des autorités consistent souvent dans la suspension ou l'abrogation des conventions
collectives par voie de décret; l'interruption de conventions préalablement négociées; l'annulation et la
renégociation forcée de conventions collectives; et la prolongation obligatoire de la validité des conventions
collectives par voie législative. Les organes de contrôle considèrent ces mesures inadmissibles lorsqu'elles modifient
le contenu de conventions déjà conclues. 12 Ils considèrent toutefois que des restrictions peuvent être imposées pour
des négociations futures au nom d'une politique de stabilisation économique ou d'ajustement structurel, c'est-à-dire
pour des raisons impérieuses d'intérêt national é conomique, si certaines garanties sont présentes. Il s'agit ici
d'une mesure d'exception et d'un test de proportionnalité en quelque sorte. Les garanties sont: 1. des consultations
au préalable avec les organisations de travailleurs 2. une période de temps raisonnable. Exemple : une période de 3
ans quant à la durée des restrictions en matière de rémunération au non d'un programme de stabilisation économique a
été jugé raisonnable par le CLS. 3. des restrictions qui se limitent au nécessaire 4. une protection effective du
niveau de vie des travailleurs concernés, notamment ceux qui risquent d'être le plus touchés. Bilan canadien à la
lumière de la protection internationale du droit de grève et de négociation collective Statut particulier des
travailleurs des services publics Il faut, avant de tirer des conclusions, avoir à l'esprit le statut particulier des
travailleurs dans les services publics pour comprendre leur force mais aussi leur fragilité concernant le droit de
grève et de négociation collective. La force de ces travailleurs dépend en grande partie de la santé économique du
pays en général. Les années 80 et 90 ont soulevé plusieurs problèmes avec la domination du discours néo-libéral sur la
diminution du rôle et de la taille de l'état. Bilan canadien quant au respect de la liberté syndicale Le Canada a
ratifié la convention n° 87 en 1972. Cette convention a été ratifiée par 141 états. Il n'a pas ratifié la convention
n° 98 (qui a été ratifiée par 152 états), ni la convention n° 151 sur les relations de travail dans la fonction
publique, 1978 (ratifiée par 40 é tats), ni la convention n° 154 sur la négociation collective, 1981 (ratifiée par 34
é tats). La non ratification de la convention n° 98 est d'autant plus déplorable qu'il s'agit d'une des huit
conventions fondamentales faisant l'objet d'un vaste consensus international sur l'établissement d'un plancher social
minimum pour tous les états peu importe leur niveau de développement à l'heure de la mondialisation. 13 La Commission
d'experts, se basant sur les rapports du Canada concernant l'application de la convention n° 87, a relevé plusieurs
violations en matière de liberté syndicale dans les dernières années : 1. déni du droit de grève pour certaines
catégories de travailleurs qui ne sont pas des fonctionnaires exerçant des fonctions d'autorité au nom de l'état ou
relevant des services essentiels; 2. des restrictions et des interdictions au droit de grève dans la fonction
publique; 3. définition extensive des services essentiels; 4. et imposition de l'arbitrage obligatoire contrevenant
ainsi au principe de négociation volontaire et à l'autonomie des parties. Les cas mentionnés explicitement référaient
à l'Ontario, à l'Alberta, au Nouveau-Brunswick et à Terre-Neuve. Le CLS a lui aussi examiné un nombre alarmant de cas
émanant du Canada. Les plaintes les plus récentes émanent surtout de l'Ontario et concernent des entraves au droit de
grève et à la négociation collective, notamment dans le domaine de l'enseignement. Une première série de plaintes
devant le CLS (autour de 20) avait débuté en 1991 contre le gouvernement fédéral (cas nos 1616, 1758 et 1800) et
différentes provinces (Colombie britannique cas n° 1603; Manitoba cas nos 1604 et 1715; Nouveau- Brunswick cas n°
1605; Nouvelle-écosse cas nos 1606, 1624 et 1802; Terre-Neuve cas n° 1607; Ontario cas n° 1722; Québec cas nos 1733,
1747, 1748, 1749 et 1750; Ile du Prince-Edouard cas nos 1779 et 1801) et territoires (Yukon cas n° 1806). Toutes ces
plaintes avaient traité à des reports d'augmentation, des réductions et des gels de salaire dans la fonction publique
ainsi que des restrictions du droit des fonctionnaires de négocier collectivement dans diverses juridictions, mesures
parfois accompagnées d'une interdiction de grève. Le cas de Canada en matière de liberté syndicale a aussi fait
l'objet d'une discussion tripartite en 1999 devant la Commission d'application des normes de la Conférence
internationale du Travail. La défense du représentant gouvernemental canadien devant l'énumération des violation en
matière de liberté syndicale au Canada a été de retomber sur le partage des compétences canadien qui accorde aux
provinces le contrôle complet sur les relations professionnelles à l'intérieur de leur juridiction. Cet argument est
faible eu égard au droit international et à la responsabilité de l'état fédéral pour ses engagements internationaux.
En 1985, une mission d'études et d'informations avait été dépêchée au Canada en raison des nombreux cas de violations
des principes fondamentaux. Dix ans plus tard, en 1995, le gouvernement a rejeté la recommandation du CLS visant à ce
qu'il ait recours à une mission d'assistance du BIT. Une telle recommandation a encore été faite dans des cas récents,
en 2001. La conclusion est que le Canada ne respecte pas les principes fondamentaux en matière de droit de grève et de
négociation collective. Il est en violation de ces obligations internationales. 14 L'impact de la Déclaration de l'OIT
de 1998 Le bilan insatisfaisant du Canada quant au respect de ses obligations internationales en matière de liberté
syndicale risque d'ailleurs d'être de plus en plus intenable politiquement et juridiquement sur la scène
internationale depuis l'adoption en 1998 de la Déclaration de l'OIT relative aux principes et droits fondamentaux et
son suivi. Cette déclaration entend donner une réponse aux défis que pose la mondialisation de l'économie. Si cette
dernière est un facteur de croissance économique, elle n'est pas suffisante et doit être accompagnée d'un minimum de
règles sociales. Les droits fondamentaux consacrés par cette déclaration comme un minimum social auquel on ne saurait
déroger sont : interdiction du travail forcé et du travail des enfants; élimination de la discrimination dans l'emploi
et respect de la liberté syndicale et reconnaissance effective du droit à la négociation collective. Cette déclaration
est importante car elle est le fruit d'un consensus international. Ce consensus sur les droits fondamentaux au travail
avait été observé lors du Sommet mondial pour le développement social à Copenhague <time>1995</time>. La Conférence
ministérielle de Singapour en 1996 tenus par l'Organisation mondiale du commerce (OMC) a renouvelé l'engagement des
états à respecter les normes internationales du travail internationalement reconnues. Le système de contrôle de l'OIT
offre déjà un moyen de vérifier l'application des conventions ratifiées par les états membres au moyen de la
production de rapport et par l'envoi de plaintes. En matière de liberté syndicale, du fait de l'importance de ce droit
reconnu constitutionnellement, l'envoi de plaintes au CLS n'exige même pas au préalable la ratification des
conventions pertinentes. Des plaintes ont ainsi pu être faites à l'encontre du Canada même si celui-ci n'avait pas
ratifié la convention n° 98. La Déclaration, sans ajouter aux mécanismes de contrôle, vient les compléter. Elle exige
des états, du seul fait de leur appartenance à l'OIT et de leur acceptation des valeurs inscrites dans la Constitution
de l'organisation, de tenir compte des principes é noncées dans les conventions fondamentales même s'ils ne les ont
pas ratifiées. Les é tats doivent donc envoyer des rapports sur la situation et sur toutes modifications é ventuelles
apportées à leur législation et à leur pratique. Le droit de grève et le droit à la négociation collective font
parties des principes internationaux auxquels les dérogations sont de moins en moins admises.</p>
<p><a href="https://www.ceq.qc.ca/travail/greve/duplessi.pdf">Isabelle Duplessis Professeur Faculté de droit Université
de Montréal Mise à jour le 8 octobre 2002</a></p>
<!--#include virtual="/footer.html" -->