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<title>Introduction à l'ufologie à l'usage du néophyte</title>
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<h2>Qu'est-ce que l'ufologie ?</h2>
<p>L'ufologie est l'étude des ovnis (de "UFO" : <em>Unidentified Flying Object</em> ou objet volant non identifié). Que
  cela signifie-t-il ? Pas grand chose, tant que l'on ne saura pas ce que sont les ovnis. Autant parler alors d'"étude
  de l'inconnu", de l'inexpliqué, ce qui, à tout prendre, est le but de la science en général. Cependant, au contraire
  de celle-ci, l'ufologie souffre de nombreux handicaps : elle s'intéresse à un phénomène non reproductible à volonté,
  se base en grande partie sur des témoignages, n'a pas de <a href="enquete/index.html">méthodologie</a> très
  développée, reste peu <a href="/org/associations.html">organisée</a>, et enfin étudie un sujet <a href="Milieu.html">controversé</a>,
  souvent raillé, parfois sulfureux, On ne sait au juste ce qu'est un "ufologue", si ce n'est une personne ayant acquis
  une certaine expérience dans l'étude des ovnis (il n'y a pas de diplôme en la matière). Un ufologue peut être un
  scientifique passionné par ce hobby les week-ends, comme un jeune facilement influençable et friand de théories
  complotistes, ou un véritable enquêteur rigoureux. Une faune hétéroclite donc, mais pourtant captivée un mystère
  commun.</p>
<section>
  <h2>Plonger dans l'ufologie</h2>
  <figure class="right side">
    <figcaption>
      Des responsables de l'US Air Force présentant le projet Blue Book d'étude des ovnis dans les années 1950s
    </figcaption>
    <img src="/org/us/dod/af/amc/atic/projet/bluebook/BlueBook.jpg"
        alt="Trois responsables de l'USAF présentant le projet Blue Book">
  </figure>
  <p>Entrer dans un domaine aussi en marge que l'ufologie se fait souvent par un choc. Le choc du décalage entre la
    réalité d'un phénomène et la manière dont la société le gère. Comme toute chose, l'ufologie est un iceberg.
    Découvrir l'ufologie, c'est passer d'une partie émergée où une poignée d'hurluberlus racontent avoir vu une
    "soucoupe volante", à un <a href="Milieu.html">microcosme</a> immergé où des milliers de spécialistes travaillent
    sur des dizaines de milliers d'observations, remontant aussi loin dans l'<a href="/time/index.html">histoire</a> que
    l'on puisse imaginer. Un monde où des observations inexpliquées sont faites tous les jours, dans le monde entier,
    confirmées par <a href="enquete/indice/radar/index.html">radar</a>, laissant des <a
        href="/science/crypto/ufo/observation/classification/hynek/ce/2">traces</a>, où les <a
        href="/people/militaires.html">armées</a> s'inquiètent légitimement et officiellement du phénomène, où des pays
    mettent en place des organismes dédiés à leur étude, font des <a href="../../../Documents/Officiels/index.html">rapports
      officiels</a>, où la majorité des témoins sont sincères, indépendants, pilotes ou agents de police et fuient toute
    publicité. Ce monde-là est tout aussi réel, mais bien méconnu. La première chose que l'on découvre du phénomène,
    c'est donc qu'il est bien réel, et pris au sérieux par nombre de gens tout aussi sérieux. Mais si considérer un
    phénomène comme sérieux et réel est une chose, l'expliquer en est une autre.</p>
  <p>En effet, la deuxième chose que l'on apprend, c'est que <a href="analyse/hypotheses/intelligence/HET/index.html">l'explication
    extraterrestre</a>, si elle largement représentée, n'est pas la seule proposée par les ufologues. On y avance aussi
    des thèses spatio-temporelle (des terriens venant du futur typiquement), <a
        href="/science/crypto/ufo/analyse/hypotheses/HPN/index.html">paranormales</a> (reliant le phénomène des ovnis à
    d'autres phénomènes paranormaux déjà signalés), ou simplement que le phénomène n'a rien d'extraordinaire, le
    réduisant à des illusions, <a href="enquete/meprise/index.html">méprises</a> et <a
        href="enquete/dossier/canular/index.html">canulars</a>. Reste une proportion de dubitatifs, reconnaissant comme
    tous la réalité d'une énigme, mais qu'aucune thèse n'a encore convaincu.</p>
  <figure class="left side">
    <figcaption>
      Traces photographiées suite à l'observation d'un "décollage" à Soccorro (Nouveau-Mexique) en 1964
    </figcaption>
    <img src="enquete/dossier/Soccorro/Socorro.jpg">
  </figure>
  <p>Les ufologues, souvent consternés que ce qu'ils découvrent chaque jour n'éveille pas plus de réactions ni de prise
    de conscience chez les autorités ou chez le grand public, trouvent dans cette effarement une force pour franchir la
    barrière des convenances, des <em>a prioris</em>, et accepter l'inconfort d'un décalage avec les idées admises par
    tous. Comment se fait-il qu'il y ait un tel décalage entre les données du phénomène et ce qu'en fait la société ?
    Tous visent à réduire ce décalage en présentant leur interprétation au public, soit comme un phénomène insoupçonné,
    soit comme un phénomène démystifié. Enfin, plus rarement, on pourra s'intéresser à l'ufologie par le besoin
    irrépréssible d'expliquer une expérience personnelle, si l'on a soi-même été témoin d'un ovni. Beaucoup ne savent
    pas si ce qu'ils ont vu était ne soucoupe volante extraterrestre ou autre chose. Cela reste, au moins, l'observation
    d'un phénoméne aérien étrange, pour lequel on a trouvé aucune explication.</p>
  <section>
    <h3>Le phénomène</h3>
    <figure class="right side">
      <figcaption>
        8 ovnis détectés par le radar de l'Aéroport National de Washington (Juillet 1952)
      </figcaption>
      <img src="enquete/dossier/Washington/1952-07-19_2.jpg"
          alt="8 ovnis détectés par le radar de l'Aéroport National de Washington">
    </figure>
    <p>Si ces courants se sont dégagés, et qu'aucune explication ne l'a pour l'instant emporté sur une autre, c'est
      parce que le phénomène est complexe, et c'est là une troisième découverte. Si on ne peut nier son existence, on ne
      peut non plus nier son apparente <a href="analyse/absurde/index.html">incohérence</a> : formes diverses,
      apparences diverses d'occupants au comportement incompréhensible (ostentatoire mais élusif, locutions parfois
      dénuées de sens), défi aux lois physiques connues. La plupart des ufologues considèrent cette image incohérente
      comme révélatrice d'une incompréhension, peut-être due à un manque d'information — une partie des données
      manquant pour comprendre le phénomène — ou au contraire à l'erreur de considérer l'ensemble des témoignages
      comme relevant d'un seul et même phénomène. On est alors tenté, soit de glisser discrètement une partie des
      données sous le tapis, soit à élaborer des théories "unifiées" sans réelles bornes, expliquant chaque jour un
      éventail plus large de phénomènes, à l'aide de concepts forcément de plus en plus abstraits.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>Les débats</h3>
    <figure class="left side">
      <figcaption>
        Symposium annuel du MUFON, une des plus grandes associations ufologiques
      </figcaption>
      <img src="/images/symp.gif" alt="Symposium annuel du MUFON, une des plus grandes associations ufologiques">
    </figure>
    <p>Tout naturellement, des débats ont lieu, constamment, entre spécialistes. On y parle de cas anciens ou tous
      récents, on échange des références, on défend des théories mais, trop souvent malheureusement, entre camps
      radicaux. D'un bord ou d'un autre, la simple évocation du doute vous catalogue rapidement chez l'ennemi. Il ne
      s'agit plus alors d'étude, mais de croyance. Parlez de l'intérêt d'une analyse socio-psy à un extraterrestrophile,
      et vous devenez un horrible sceptique. Parlez ensuite de l'intelligence apparente ce certains objets inexpliqués à
      un sceptique extrême, et vous devenez un illuminé. C'est le collage d'étiquette, c'est-à-dire en somme l'antithèse
      d'un débat : décréter ce que pense une personne, et la cataloguer dans le camp adverse, avec qui il n'est pas
      digne de discuter. On ne discute trop souvent qu'entre gens d'accord entre eux, pour faire avancer la cause,
      conspuer les ennemis, se donner des armes supplémentaires, dans l'espoir de bientôt remporter la "victoire".</p>
    <p>Cependant on ne peut reprocher aux croyants de ne discuter qu'entre eux. D'abord parce qu'il ne s'agit pas d'un
      comportement surprenant dans le contexte où ils se trouvent, mais aussi parce que cela évite autant de débats
      stériles dont on ne pourrait de toute façon rien espérer. <span class="exergue">Lorsqu'on ne veut pas accepter la réalité de quelque chose, rien, absolument rien ne convainc</span>,
      disait <span class="people">Pierre Guérin</span>, un ufologue célèbre, et astronome par ailleurs. Après tout donc,
      cela évite à chacun de perdre du temps, aussi bien les croyants que les chercheurs, pour qui les étiquettes
      deviennent autant de panneaux "Ne pas déranger".</p>
    <p> Dans tous les cas, croyants ou chercheurs, il arrive que les egos s'en mèlent. Si c'est peu surprenant pour les
      premiers, c'est regrettable pour les derniers. De personnes ou de groupements, ces fiertés égoïstes nuisent
      parfois à la recherche en général, éludant des dialogues — un chercheur réputé ne parle pas avec un jeune
      blanc bec
      — ou entretenant un secret — il faut sortir un scoop avant telle association, il ne faut pas que telle
      information filtre — plus ou moins bien motivé : l'intérêt de la recherche reste l'information ou l'action
      menée en elle-même, qui que soit son initiateur. Heureusement la vérité finit toujours pas être connue, et
      nombreux sont les chercheurs privilégiant la connaissance avant la reconnaissance.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>Les actions</h3>
    <figure class="left side">
      <figcaption>
        Un témoin policier, un agent fédéral, un major de l'Air Force, une enquêtrice amatrice et un sergent de police
        militaire, tous sur le lieu de l'observation (1964)
      </figcaption>
      <img src="enquete/dossier/Soccorro/Zamora_Burns_Mitchell_Loren.jpg">
    </figure>
    <p>On trouve divers types d'actions ufologiques, auxquels correspondent souvent des profils d'ufologues. A la base
      de tout sont les enquêteurs, somme toute assez rares, mais indispensables. Ce sont eux qui, lorsqu'une rumeur
      circule, vont la vérifier, généralement à leurs propres frais. Il peut s'agir d'un travail de fond sur un cas
      réputé ou d'aller interroger les témoins d'une observation récente. De leur méthodologie dépend la qualité des
      données et donc des analyses. On trouve malheureusement autant de méthodologies que d'enquêteurs, et une collecte
      homogène des données reste à inventer. En effet, de la même manière que l'on peut pondérer la valeur d'un
      témoignage en fonction du profil du témoin (sa profession et ses compétences d'observation afférantes, sa
      réputation), le profil et la méthodologie de l'enquêteur lui-même ne sont pas neutres, et il reste hasardeux de
      les considérer homogènes, dans une étude <a href="analyse/statistique/index.html">statistique</a> typiquement.</p>
    <figure class="right side">
      <figcaption>
        Une explication de photographie célèbre d'ovnis
      </figcaption>
      <img src="enquete/dossier/Washington/1952-07-Capitol_lightsMatch.jpg">
    </figure>
    <p>Exploitant le travail des enquêteurs, sont les chroniqueurs, les archivistes, répertoriant, synthétisant et
      publiant les données. Tels des journalistes n'allant pas sur le terrain, ils peuvent avoir la fâcheuse tendance à
      se recopier de proche en proche. Rarement enquêteurs eux-mêmes, ils ne vérifient que trop rarement leurs sources,
      et pourront se muer en vecteur de rumeurs infondées, souvent involontairement, mais parfois pendant très
      longtemps. Ce travers s'est d'autant plus développé avec l'émergence d'Internet, vecteur de communication facile
      et accessible à tous. Comme pour d'autres domaines, Internet à cependant apporté une accélération considérable à
      la recherche ufologique, au travers d'une grande démocratisation (voire de tribunes) et d'une capacité accrue de
      communication (dialogues, données multi-media). Cependant, encore une fois, les actions rendues possibles par ces
      nouveaux moyens sont limitées. Elle se réduisent à la transposition de l'écrit et de l'image tels qu'ils existent
      aujourd'hui en informatique, et la sémantique comme l'organisation de ces données reste spécifique à chaque
      chercheur, de sorte que l'échange et le traitement de l'ensemble des données disponibles reste problématique.</p>
    <p>Enfin sont les théoriciens. Sur les bases des données publiées, ils élaborent des classifications, des études <a
        href="analyse/statistique/index.html">statistiques</a>, et parfois des modèles d'explication du phénomène ou de
      certains de ses aspects. Un scientifique pourra proposer un modèle de propulsion expliquant certaines
      caractéristiques observées, un autre ufologue pourra avancer une théorie expliquant une sous-catégorie du
      phénomène, etc. Leur travail est chaque jour remis en cause par de nouveaux faits, et cent fois sur le métier
      remettront leur ouvrage les adeptes de la méthode scientifique.</p>
  </section>
</section>
<section>
  <h2>L'ufologie est-elle une croyance ?</h2>
  <p>L'ufologie est en marge de la société, plus encore que des disciplines comme l'<a
      href="../../para/astrologie/index.html">astrologie</a>, la voyance, le <em>feng shui</em> ou la religion en
    général. A la différence de ces dernières, elle n'a pas de vérité établie. Elle est, par définition, une activité de
    recherche. C'est ici la première confusion que l'on fait à son égard : le public s'imagine que les ufologues sont
    des gens qui "croient aux ovnis", c'est-à-dire — dans l'esprit du public — croient que des vaisseaux
    spatiaux extraterrestres visitent la Terre. Pour un ufologue, "ovni" n'a pas la même définition : le terme se résume
    à son sens strict, c'est-à-dire un phénomène aérien qui n'a pu être identifié. Certains rechignent même à utiliser
    le mot "objet" qui est déjà pour eux un parti pris, et se cantonnent à parler de "phénomène". Pour un ufologue, un
    "véritable ovni" est un ovni qui n'a pas reçu d'explication, après enquête.</p>
  <p>Il n'y a donc, en ufologie, ni d'ovni systématique, ni d'explication systématique. En fait, la plupart des
    ufologues n'ont pas d'explication. Les autres sont de véritables "croyants" — en une explication
    extraterrestre, en une explication paranormale, en une explication rationaliste, etc. — et passent plus de
    temps à défendre une thèse qu'à chercher une explication — c'est moins frustrant, mais ça ne mène pas au même
    but. </p>
  <p>L'ufologie n'est donc pas une croyance. Elle n'a pas de vérité à présenter, elle n'a pas de dogme, ni d'impact dans
    la vie de tous les jours. Mais comme toute activité de recherche, elle a aussi ses propres "marges" de croyants.</p>
</section>
<section>
  <h2>L'ufologie est-elle une science ?</h2>
  <figure class="left side">
    <figcaption>
      Publication du rapport de l'étude sur les ovnis commandée par l'US Air Force
    </figcaption>
    <img src="/time/1/9/6/8/CondonReport/bantam.gif"
        alt="Publication du rapport de l'étude sur les ovnis commandée par l'US Air Force">
  </figure>
  <p>S'il est un point commun aux ufologues, c'est bien la volonté de reconnaissance. Ils entendent par là une
    acceptation publique de la réalité du mystère qu'ils étudient et de l'intérêt de son étude, avec le soutien que cela
    suppose de la part des autorités. Les ufologues sont convaincus du bien fondé de leur travail, et ressentent comme
    une injustice qu'il ne soit pas reconnu. Pour atteindre cette reconnaissance, ils se sont fixés un modèle : la
    science. Celle-ci représente la rigueur, la respectabilité, et le soutien que recherche l'ufologie. Pour atteindre
    ce but, certains ufologues se sont mis à appliquer à l'étude des ovnis la méthologie scientifique qu'ils ont apprise
    durant leur formation, ou sur le tas. D'autres, avec moins de bonheur, voudraient faire de l'ufologie une science
    <em>en elle-même</em>, comme si l'étude des pierres tombant du ciel avait donné place à la météoritologie, ou que la
    découverte d'une civilisation extraterrestre puisse un jour être une discipline en soi. L'ufologie a ses experts,
    elle a même ses scientifiques, elle peut se pratiquer scientifiquement, mais de fait, n'est pas une science, et n'a
    pas vocation à l'être.</p>
  <p>Le aspects les plus voyants et les plus troubles de l'ufologie — ceux que voit le grand public —
    rendent donc problématiques ses relations avec la science. L'ufologie fait la cour à la science mais persiste une
    sorte de "je t'aime moi non plus" où l'une veut séduire, convaincre et embrasser, et l'autre est méfiante, voire
    repoussée par l'image que donne la première. Comme en amour, on fait des efforts, on veut être pris au sérieux (on
    change de nom, passant de "soucoupe volante" à "ovni", puis à "phénomène aérien non identifié", on sort ses plus
    belles formules et ses plus belles théories) et cela paye parfois : quelques scientifiques daignent alors oublier sa
    façade peu engageante pour s'intéresser à sa beauté intérieure. Mais la vie n'est pas un conte de fée, et pour la
    majorité c'est l'image qui reste importante avant tout, une image pour l'instant trop peu rassurante et crédible
    pour un néophyte, fut-il scientifique.</p>
  <section>
    <h3>L'ufologie est-elle rationnelle ?</h3>
    <figure class="right side">
      <figcaption>
        Tentative de corrélation entre observations d'ovnis et activité sismique dans le bassin de Uinta (1967)
      </figcaption>
      <img src="/images/p040-15.gif">
    </figure>
    <p>S'il est un acte rationnel, c'est bien de chercher à expliquer ce qui ne l'est pas. Combien de néophytes —
      parmi le grand public ou les scientifiques — vont qualifier l'étude des ovnis d'"irrationnelle", alors que,
      s'il est une attitude irrationnelle, c'est bien d'émettre un avis sur un problème que l'on a jamais étudié. C'est
      ce que l'on appelle un <em>a priori</em>, un avis avant étude.</p>
    <p>Une autre tendance rationnelle, plus rare, consiste à suivre la vérité là où on la trouve. Si certains
      considèrent que changer d'avis est un comportement peu respectable, un "retournement de veste" qui ne serait que
      le signe d'une instabilité ou d'un opportunisme honteux, d'autres y voient la preuve d'une honnêté flagrante. On
      peut effectivement se demander ce que l'on a à gagner en changeant d'avis, que cela soit en science ou en
      ufologie. De la part de vos anciens sympathisants, que des colibets. De la part d'autres et surtout de soi-même,
      du respect. Changer d'avis en ufologie comme en science, est bien au contraire l'attitude la plus respectable que
      l'on puisse considérer. C'est admettre s'être trompé, et accepter d'en payer le prix pour coller à la réalité de
      la vérité. En ufologie quelques figures ont changé d'avis. Des partisans de l'extraterrestre ont évolué vers du
      paranormal plus large, d'autres vers le socio-psychologique, d'autres encore ont été troublés au point d'envisager
      sérieusement la visite de civilisations non humaines. Quel que soit leur choix, ils n'oublient pas leur expérience
      passée, il n'oublient pas ce en quoi ils ont cru. Au contraire, c'est justement cette expérience qui les a conduit
      vers ce nouveau stade de réflexion, et qui n'est, pourquoi pas, peut-être pas le dernier. Ainsi se construit
      l'intelligible, ainsi se construisent les explications, par essais et erreurs successifs, à l'image de la
      science.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>L'ufologue et le grand public</h3>
    <p>Du jour où l'on commence à s'intéresser réellement au mystère posé par les ovnis, on entre dans un autre monde :
      un monde si vaste, empreint de ramifications, et si complexe que l'on s'apperçoit bien vite qu'il ne saura être
      accessible au public à qui l'on voudrait en faire part. On réalise que cela ne sera possible qu'au prix de
      simplifications et de compromis que l'on se refuse à accepter. Un scientifique accepterait-il simplications,
      termes approximatifs ou amalgames ? Rare sont les bons "vulgarisateurs" en ufologie, parce que le cœur du mystère
      réside dans l'accumulation des données, intransmissible en quelques phrases. Il y a là des trésors pour les
      scientifiques de tout domaines, mais ils ne le savent pas — et pour l'instant, ne veulent pas le savoir.</p>
    <p>C'est donc enfermé, aussitôt, que l'on penêtre dans le monde des ovnis. Certains s'autoriseront des sorties pour
      recommuniquer avec le monde des "vivants", y gagnerons un équilibre, et d'autres y resterons reclus, préférant
      partir dans les profondeurs d'une connaissance privilégiée. Dans les deux cas, une réelle communication avec
      l'extérieur restera donc impossible. Est-ce grave ? D'autres domaines, comme les sciences officielles ne
      connaissent-elles pas le même sort ? Si, et elles semblent bien s'en accommoder. Car, contrairement à l'ufologie,
      le public croit en elles, et c'est ce qui fait toute la différence.</p>
    <figure class="left side">
      <figcaption>
        — Whoa... Vous avez vu ça ? — V-vu quoi ? — Moi non plus !
      </figcaption>
      <img src="/images/BornLoserUFO.jpg" alt="Jim et Coral Lorenzen et la boîte-aux-lettres de l'APRO">
    </figure>
    <p>Ce public, et sa position face son domaine, l'ufologue le connaît par cœur. Il connaît sa typologie, ceux qui,
      sans jamais avoir étudié la question, vont déclarer "y croire" ou "ne pas y croire", et poser leurs sempiternelles
      questions : "Est-ce que vous y croyez ?", "Y-a-t-il des preuves ?" et autres "Est-ce que ça existe ?" Des
      questions pourtant si simples, mais qui hantent les ufologues, car ils ne peuvent y apporter de réponses. Ils ne
      croient pas, ils cherchent. Il y a des preuves, mais ce ne sont pas celles que vous attendez. Des choses existent,
      mais on ne sait pas ce que c'est. Pour le public, rien que des réponses insatisfaisantes. Commencez une réponse
      par "ça dépend" ou "je ne sais pas", et un néophyte perd son intérêt. Ce qu'il veut, ce sont des réponses, pas des
      recherches en cours. Mieux vaut encore dire "Je vous dirais quand j'aurai trouvé."</p>
    <p>Un autre problème dans le discours au grand public est de ne pas passer pour un fou. Il faut en effet se souvenir
      que celui-ci considère toujours les ovnis comme des vaisseaux extraterrestres. Quand il vous demande "Est-ce que
      les ovnis existent ?", c'est en fait "Est-ce que des vaisseaux extraterrestres visitent la Terre ?" qu'il vous
      demande. L'ufologue, dans son propre langage, répond naturellement "oui" — la question lui semble même
      saugrenue : bien sûr que des gens voient tous les jours des phénomènes aériens qu'ils n'expliquent pas, et qui
      seront peut être expliqués plus tard — mais dès cet instant il est catalogué comme le plus endoctriné des
      raéliens. Répondez "je ne sais pas" et vous verrez la stupeur dans l'œil de votre interlocuteur : "Eh bien alors,
      pourquoi vous y intéresser ?". Même lorsque le grand public comprend que vous cherchez, il pense que vous le
      faites parce que vous croyez. Il pense que vous voulez révéler au monde une vérité. Il ne comprend pas que vous
      êtes simplement en train de chercher des réponses à des faits qui vous dépassent, et qui le dépassent sûrement lui
      aussi.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>Le problème de la "preuve"</h3>
    <p>Si vous voulez irriter un ufologue, demandez-lui s'il a une preuve. Non pas parce qu'il n'en a pas, mais parce
      que, quoi qu'il vous réponde, il sait que vous n'en resortirez pas satisfait. Soit vous la rejeterez, victime de
      vos a prioris, soit vous resterez dubitatif, faute de pouvoir vérifier. Mais jamais — jamais — vous
      n'irez vérifier par vous-même. Parce que vous n'êtes pas ufologue. Parce que vous avez une conviction simple, et
      que vous ne voyez pas pourquoi en sortir. Pour trouver efforts et problèmes ? Non, vous "n'y croyez pas, et c'est
      très bien comme ça. Une incrédulité <em>a priori</em> qui n'est en fait bien sûr qu'une croyance comme une autre,
      un jugement de convenance. Un exemple en est le medium à tort emblématique de la preuve : la photographie. Tout le
      monde connaît la fameuse phrase "j'y croirai quand j'en verrai". </p>
    <figure class="right side">
      <figcaption>
        "Une forme indéfinie ? Ca peut être n'importe quoi..."
      </figcaption>
      <img src="/time/1/9/5/0/02/24/Datil_GreenFireball_USAF.jpg" alt="Coral et Jim Lorenzen vers 1953">
    </figure>
    <p>Montrez une photo d'ovni flou à un croyant, une boule lumineuse par exemple. Pour un partisan de l'hypothèse
      extraterrestre, il n'est pas étonnant que votre photo soit floue car les ovnis sont dotés d'un dispositif
      permettant de ne pas apparaître nettement sur les photos (où le gouvernement exploite un tel dispositif pour que
      l'on ne puisse rapporter de bonnes photos d'ovnis pour les complotistes). Pour un partisan de la socio-psychologie
      ou le grand public, c'est probablement une étoile, une planète, la Lune, un phare ou au pire de la foudre en
      boule, ajoutant "les photos d'ovnis sont toujours floues, comme par hasard. Montrez-moi donc une photo
      nette". </p>
    <figure class="left side">
      <figcaption>
        "Une soucoupe nette ? Forcément faux !"
      </figcaption>
      <img src="/time/1/9/6/5/08/03/Helfin_1.jpg" alt="Jim et Coral Lorenzen et la boîte-aux-lettres de l'APRO">
    </figure>
    <p>Montrez alors une photo d'ovni nette à un croyant. Une superbe soucoupe volante, sans aucune équivoque, en gros
      plan. Un défenseur de l'hypothèse extraterrestre vous dira qu'il s'agit d'une preuve indubitable, voire que seul
      un complot peut expliquer que l'on nie de tels éléments factuels. Le sceptique qui demandait cette photo nette
      vous dira qu'elle est "trop belle pour être vraie", et qu'il ne peut s'agir que d'un canular. Par définition.</p>
    <p>On voit bien ici que ce n'est pas la preuve qui est en cause, mais la croyance. Conformément à son principe, le
      croyant évalue la véracité des faits en fonction de sa foi. Le président de l'ONU serre la main à un
      extraterrestre ? Puisque les extraterrestres ne peuvent pas exister ou nous visiter, c'est soit un trucage, soit
      une manipulation de l'opinion. Tous les scientifiques du monde entier s'entendent sur l'explication
      socio-psychologique des ovnis ? Puisque nous sommes visités par des extraterrestres, ça ne peut être qu'un
      complot. Les faits ne sont pour la croyance qu'un vecteur d'expression. Rien ne sert donc de remplir les critères
      de preuve d'un croyant, car la foi offre toujours un rebond possible. C'est le contraire de chercher.</p>
    <p>Maintenant que répondrait un non-croyant face à ces photos ? Qu'une photo n'est pas une preuve. Il l'analysera,
      en tirera des conclusions quand à la possibilité d'un trucage ou les caractéristiques du phénomène photographié,
      mais jamais il ne concluera sur un cas — et <em>a fortiori</em> sur l'ensemble du phénomène ovni — sur
      le seule base de ce que le grand public considère intuitivement comme une "preuve". De la même manière, si les
      témoignages, les échos radar, les traces au sol constituaient des preuves incontestables, l'ufologie aurait depuis
      longtemps pignon sur rue. On est plutôt en droit de penser que la véritable preuve, s'il y en a une, se trouve
      au-delà de tel ou tel élément matériel. Nous disions tout à l'heure qu'on ne pouvait faire transmettre le mystère
      de l'ufologie en quelques mots, parce que son mystère résidait dans sa complexité, sa multitude, et l'accumulation
      des données. C'est donc peut-être là qu'il faut chercher. Dans la globalité plutôt dans que les détails,
      fussent-ils les plus concrets. Expliquer un cas, dans un sens ou dans l'autre, n'est pas expliquer le phénomène.
    </p>
  </section>
  <section>
    <h3>Envisager un phénomène nouveau</h3>
    <p>N'y a-t-il donc de salut en ufologie que par le non-choix ? Est-il déraisonnable et faire acte de croyance que
      d'envisager que nous soyons visités par des extraterrestres ou que le phénomène soit finalement explicable ? Bien
      sûr que non. Comme partout, si les marges sont dangereuses, c'est moins par les questions qu'elles posent que par
      les réponses qu'elles apportent — quand elles en apportent. Le phénomène ovni relève-t-il réellement de
      l'inconnu, ou n'est-il que la conséquence d'un ensemble de méprises et mécanismes psychologiques connus ? Est-il
      superflu ou nécessaire pour la science d'envisager une thèse éloignée du conventionnel, et à quel prix ? Les
      questions sont légitimes, mais les réponses apportées aujourd'hui sont-elles acceptables ?</p>
    <p>Du point de vue la science, on sait que l'émergence de théories nouvelles (les météorites, le vol des plus lourd
      que l'air) ont toujours eu la vie dure, même lorsqu'ils étaient facilement reproductibles. Le phénomène ovni a
      quant à lui le désavantage de ne pas être reproductible, et de reposer en grande partie sur des témoignages.</p>
    <p>au pire dogmatiques et au mieux prématurées. Certains cas d'ovni sont à l'évidence explicables par des mécanismes
      socio-psychologiques, et d'autres cas résistent à l'évidence à toute explication par des phénomène connus. Aucune
      croyance ne rend compte de l'ensemble. </p>
    <p>L'ufologue n'est pas aux assises, et on ne lui demande pas de trancher, en temps et en heure, en livrant son
      "intime conviction". Non, on lui demande chercher, sereinement et rigoureusement, et de livrer une explication
      quand il l'aura trouvée, pas avant.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>Les croyants</h3>
    <figure class="left side">
      <figcaption>
        La 13ᵉ "Convention Annuelle des Vaisseaux Spatiaux" à <em>Giant Rock</em> (Californie) réunit 5000 personnes en
        octobre 1966
      </figcaption>
      <img src="/time/1/9/6/6/10/GiantRock_AnnualSpacecraftConvention.jpg"
        alt="13ᵉ 'Convention Annuelle des Vaisseaux Spatiaux' en Octobre à Giant Rock (Californie)">
    </figure>
    <p>Par définition, les croyants n'ont pas besoin de preuves. Leur foi ou intime conviction leur montre dans tout
      fait une preuve supplémentaire. Il y a plusieurs familles de croyants. En tout premier lieu le grand public, qui a
      son opinion <em>a priori</em> sur les ovnis, pourtant sans jamais les avoir étudiés. Il y aussi certains ufologues
      : pour prendre deux extrêmes, on peut citer ceux défendant "l'approche socio-psychologique" et ceux défendant
      "l'hypothèse extraterrestre". Dans un cas comme dans l'autre, ce n'est pas l'objet de leur croyance qui est en
      cause. Chacun peut raisonnablement s'accorder sur l'intérêt d'une étude socio-psychologique — s'en passer
      reviendrait à considérer naïvement le témoin comment un rapporteur toujours objectif et fiable — comme sur
      l'ouverture à une explication extraterrestre du phénomène. Les deux sont nécessaires, mais aucune n'est suffisant.
    </p>
    <figure class="right side">
      <figcaption>
        "que des ballons ?"
      </figcaption>
      <img src="/images/ballons.jpg" alt="Coral et Jim Lorenzen vers 1953">
    </figure>
    <p>C'est donc ici la démarche qui est en cause. Les termes "approche" comme "hypothèse" en sont d'ailleurs très
      révélateurs : chacun désigne, non pas une méthodologie permettant d'aboutir à un résultat, mais une thèse à
      valider. Chacun commence par poser sa conclusion, puis examine les données qui, à coup sûr, doivent s'y accorder.
      Les cas récalcitrants seront, pour une thèse comme pour l'autre, "oubliés" ou rélégués à d'étranges catégories
      telles que, selon les familles : "canular possible", "trucage possible" — tout est possible en définitive,
      sauf la contradiction — du pudique "manque d'informations" — lorsque seules des informations <em>non
        admissibles </em>sont disponibles — ou au contraire de la "manipulation", du "canular visant à
      décrédibiliser" propres aux théoriciens de la conspiration. On ne verra jamais un croyant en "l'hypothèse
      extraterrestre" admettre que certains cas pourraient avoir une explication socio-psychologique, et je l'on ne
      verra jamais un croyant en "l'approche socio-psychologique" admettre que certains cas pourraient avoir une
      explication extraterrestre. C'est là le symptôme même de la croyance.</p>
    <p>Les croyants confondent donc moyen — une hypothèse, un axe d'étude — et but, conclusion. En
      choisissant de n'utiliser qu'un seul de ces outils à leur disposition — que l'hypothèse extraterrestre ou
      que l'hypothèse psycho-sociologique — ils renoncent en fait à tout espoir de trouver une explication. Et
      pour cause, ils n'en cherchent pas : ils l'ont déjà, et la défendent. Lorsque survient un cas qui ne répond pas à
      leur dogme, il l'oublient, ou, lorsqu'il est trop voyant pour être mis de côté, échafaudent un écheveau si coûteux
      de suppositions, conditions nécessaires ou de raisonnements fermés qui s'auto-entretiennent qu'ils en perdent
      toute crédibilité. Les croyants s'enfoncent chaque jour un peu plus dans leur spirale, qui intéresse plus la
      sociologie que les ufologues.</p>
  </section>
  <section>
    <h3>Pourquoi des croyants ?</h3>
    <p>Intuitivement, on sent bien qu'il n'y a qu'une seule vérité possible. Cela semble logique. Quand quelqu'un
      raconte avoir vu un ovni, soit il s'agissait d'un véhicule extraterrestre, soit ce n'en était pas un. Il n'y a pas
      de "juste milieu" en la matière. Certes, mais pour un second cas ? Et un troisième ? C'est compliqué. Quand les
      choses deviennent trop compliquées, apparaît comme par magie la conviction. A un moment de son étude du phénomène,
      tout ufologue est susceptible de devenir "convaincu" d'une théorie ou d'une autre. Dans ces moments-là, les cas
      dérangeants disparaissent. En notre for intérieur on sait très bien qu'ils sont là, mais on les oublie, on les met
      de côté, en se disant qu'il s'agit de bruit, d'erreur de témoignage et bref, qu'après tout, ce ne doit pas être un
      témoignage probant, puisque la grande majorité du reste semble coller à la théorie qu'on s'est choisie. Une
      théorie qui a au moins l'avantage de nous sortir d'entre deux eaux où, décidément, il est pas agréable nager trop
      longtemps. Vient effectivement un moment où il n'est décidément plus supportable de ne pas savoir, ou du moins de
      ne pas croire savoir. Eviter cette désagréable impression de stagner, d'avoir passé toutes ces années à étudier
      sans avoir avancé. Alors on renonce, et l'on se décide, consciemment ou pas, soit à lâcher l'ufologie, soit à
      défendre une thèse plus facile que le phénomène lui-même. Il est plus facile de voir du "tout
      socio-psychologique", comme il est plus facile de voir du "tout extraterrestre". Mais le phénomène est toujours
      là, lui, et n'est pas facile.</p>
  </section>
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